* : A lire en écoutant Infinity de Grégoire Lourme (Passer 2 couplets)
Entre deux eaux, par dessus les prairies vertes, en dessous de la surface, parmi les reflets, elle vole.
Au delà des roches, le long des tombants, invisible comme le courant marin, légère comme la brise du large, elle plane.
Mais ce qu'elle préfère avant tout c'est se promener au milieu de son grand jardin magique.
Elle y joue avec les dauphins, file au milieu des bancs d'oblades, puis va se promener avec une famille de corbs.
Elle compte les étoiles de mer, va caresser un oursin diadème et ensuite admire du corail en fleur.
Parfois elle chante avec les cigales de mer, chevauche un hippocampe ou protège un nid de labre.
Oh, je la connais bien. Elle, qui ne s'approche jamais, est souvent venue me tenir compagnie.
Plus d'une fois elle m'a guidé, plus d'une fois m'a fait découvrir son monde.
Elle m'en a montré sa beauté, mais par dessus tout m'a appris à ne pas l’abîmer.
Si un jour vous voyez les nudibranches se dresser, les comatules s'envoler et les poissons se figer, arrêtez-vous.
Elle sera sûrement là en train de vous observer, bien cachée au milieu du plancton. Laissez vous aller...
Si vous lui plaisez, elle vous prendra alors la main, comme elle l'a fait pour tant d'entre nous.
Sous la surface de la Méditerranée vit une toute petite Nymphe. C'est elle qui a fait rêver nos grands anciens.
Dans son sillage les posidonies ondulent, les cachalots soufflent. Elle est l’âme des vagues, imprévisible.
Elle vole, elle plane, elle joue, elle chante pendant que les humains se créent des regrets.
Mais depuis peu je n'entend plus son chant. Depuis peu je n'entend plus sa voix.
Est-elle partie loin des hommes sans espoir et sans but? A t-elle été voir les poissons lune dans les grand fonds?
Si c'est le cas, j'aurais alors tant aimé la suivre. Pourquoi ce maudit besoin d'air m'en empêchera t-il toujours?
Je l'imagine plutôt, soupirant dans l'air froid du grand large, à des millions de kilomètres des villes et des gens.
Assisse seule, sur un banc de brume, regardant à travers les yeux d'une galathée le plastique envahir son monde.
Comme un pétrel volant au ras des vagues, elle a certainement dû voir des pêcheurs massacrer des dauphins.
Si la chance vous sourit et que vous la rencontrez, dites lui combien elle nous manque.
Si vous la voyez, dites lui que nous avons tous besoin d'elle. Dites lui que tout a changé.
Dites lui qu'a cause de la folie des hommes son jardin est en train de faner ...
Photographies dans l'ordre d'apparition: des acétabulaires, une famille de corbs, détail d'un spirographe, une Hervia, des anémones encroûtantes jaunes, une rascasse, un cténaire (Euplokamis?), et une vue typique du coralligène.